J'ai glissé dans ma besace un petit instrument plein de tempérament. Son inventeur (d'accord, je n'ai pas lu Ceronetti...), comme le chat de sa page qu'on l'imagine avoir choisi comme avatar, écarquille derrière son lorgnon un œil éberlué sur le monde. L'occasion pour lui de tirer des portraits acides, bien sentis. Le choix des illustrations fait preuve d'une certaine originalité - quoique celle du billet d'hier ne m'enthousiasme pas. Pour le seul titre de ce blog, j'en conseillerais la visite. Comment appelle-t-on cette figure de rhétorique qui appose à l'instrument lui-même un qualificatif de l'humeur dans laquelle nous plonge son emploi ? Le raccourci donne du contraste à l'image. On pourrait évoquer nos théières extatiques, la cérébralité du sheng en son grand âge, quelques glaises trop inquiètes...
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Et comme les humeurs, d'un blog à l'autre, se répondent ! L'image du couloir (couloir de lycée déroulant sa succession de salles de classe, couloir obscur d'un appartement au bout duquel mourait mon arrière-grand-mère) a éveillé chez Calyste des souvenirs d'autres couloirs de douleur.
Si je reviens quotidiennement contempler son Potomac, c'est parce qu'il émeut. Ses rapides sont d'un fleuve libre, jetant chaque jour une eau neuve entre ses rives ; en s'élargissant, celles-ci endiguent dans ses méandres un cours plus ample, plus étale, une endophasie dans laquelle se mirer. J'aime aussi une certaine façon d'exprimer simplement la douleur quand elle survient. Pour ma part, on m'aura longtemps dispensé de ces souffrances incommensurables ; certaines affres ne m'auront affligé que par ouï-dire, en quelque sorte. Cela n'ôte rien à mes chagrins mais les qualifie plus précisément. Et à la faveur de l'obstacle, un rocher, un dénivelé : schplaf ! la cascade repart avec une force et une gaieté décuplées.
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Ce matin, la lumière affluait par la fenêtre de ma salle de bains et j'ai pris ma douche au soleil. Depuis l'immeuble d'en face, des voisins pourraient se scandaliser. J'aime trop ces rayons matinaux pour les occulter par des stores. (Et j'exagère, on ne m'aperçoit pas totalement... ceux du dernier étage, peut-être... en grimpant sur une chaise...) Pourtant ce plaisir a son revers, quand il faut se botter doublement le cul pour affronter la rue, attraper un bus étouffant, se reconnaître dans la lassitude d'autrui, se savoir si semblable et endurer sa part du croque monstre show quotidien. C'est par l'effet d'une mélancolie de cette nature que mon ardeur risque chaque matin de retomber comme une crêpe.
2 commentaires:
"La mélancolie, c'est le bonheur d'être triste" V.Hugo
Que dire, Patrick? Seulement merci, mais vraiment merci.
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