lundi 29 septembre 2008

Un arbre

Qu'on prononce le mot "table" et j'en vois une : la table archétypale, symbole de toutes les autres. Qu'on prononce le mot "arbre" et dorénavant, l'image de cet arbre s'imposera peut-être à mon esprit. Les autres, en conservant leurs caractéristiques, lui ressemblent un peu. Un tronc, des racines, des branches... tout y est.

Quantité de choses ne suivent pas cette règle, et des plus essentielles à ma vie. Sur bien des concepts je ne place aucune image. Ainsi le mot "thé" pour beaucoup évoquera le sachet suspendu au bout d'une ficelle, qu'on trempe quelques secondes dans une tasse d'eau chaude pour la colorer. De mon point de vue, quelle serait la forme conceptuelle première, irréductible, du thé ? Je n'en vois pas. Je n'arrive pas à le penser.

Je ne pense pas davantage l'amour et l'amitié, la beauté, l'art et l'ennui... Toutes choses qui prennent des formes si singulières et si diverses que je ne leur connais pas de modèles.

Par ailleurs, les images que je façonne évoluent au gré des humeurs et j'autorise volontiers qu'on les démolisse. Ma "maison" aurait pu encore longtemps se réduire à ce fauteuil où je m'assoupis, bois, lis - dans cet ordre de priorité. Il aura suffi d'une soirée pour que ces repères se transforment. Les lieux se voient dorénavant investis d'un supplément de chaleur : je remercie mes amis d'avoir en un éclair fait de ce "chez moi" un endroit autrement plus convivial et d'avoir décongelé la conception que je m'en faisais. 

lundi 22 septembre 2008

La tasse


Cette tasse provient de la boutique du musée des fours à porcelaine impériale des Song du Sud à Hangzhou. Pas moins. Je l'ai vue, j'ai craqué pour ses craquelures, tout de suite aguiché par ses formes douces et cette glaçure artistement nervurée. Malgré son poids (140 grammes), je l'imaginai aussitôt à mes lèvres, pourvoyeuse des 4 ou 5 centilitres de thé qu'elle saurait contenir. Se fût-elle présentée en deux exemplaires que je les aurais achetés tout pareillement ; elle avait bien une sœurette, jumelle hélas dizygote, que le teint jaunâtre posait d'emblée en cadette souffreteuse.

C'était donc elle. Elle en a vu, du pays !

Hier, me remettant du décalage horaire, j'essaie avec bonheur mon nouveau plateau. Je l'étrenne avec un fond de Tie Guanyin qui traîne sur une étagère. Pas inintéressant, un traitement vieux jeu en fait quelque chose de bien plus structuré que ce que j'ai bu ces dernières semaines. Et me vient l'idée de déballer la tasse. Je la fais monter progressivement en température, pour observer les réactions de sa surface ; si lourde en main, elle présente des abords si fragiles... Un filet pour commencer, sous le robinet, et petit à petit, en douceur, je l'amène à l'ébouillantage. Elle ne hurle pas, tout va bien. Zou ! une rasade de l'infusion en cours. Les belles couleurs que voilà ! quelle profondeur, quels dégradés ! C'est toute ma nature contemplative qui frémit. J'y passerais des heures. Mais il faut boire ces promesses : ma main s'avance, le geste est précis, confiant, le mouvement souple. Le nez fait son timide, n'est-ce pas gentil ? Et voilà : en bouche, totalement fluide, la liqueur a perdu non seulement ses arômes, mais une bonne part de sa structure - froid, plat comme le delta du Yangzi.

Bigre. Ai-je le coeur bien net, dans cette affaire ? J'ai tenté ce soir un comparatif sur un cuit "facile", la Fu Hai 2000 de Teamasters. Eh ! bien oui, quoi : doux mais nourrissant, simple, assez mignon tout de même. Et puis flûte, le thé importe peu, c'est d'une impression comparée de la liqueur en bouche qu'il s'agit là. Pêle-mêle sur la photo : à gauche une tasse achetée à la M3T dès mes premiers pas et à laquelle je reviens sans cesse, au fond une petite coupe en céladon de TM et la traîtresse, la perverse au premier plan. Dans la première tasse, la liqueur est vive, précise. C'est aussi dans celle-ci qu'elle reste chaude le plus longtemps. Dans la seconde, elle gagne en douceur, un velouté que j'aime assez. Le contact sur la lèvre est beaucoup plus sensuel, aussi : ma préférée. Et dans la troisième... dans la troisième, encore une fois, il ne reste pas grand-chose. Autant dire rien.

Dans ses rainures profondes s'abîment les qualités de ce qu'on y verse. Elle broie, elle mâche ; j'ai la sensation bizarre que cette tasse boit à ma place. Au regard de ce thé, je blêmis d'imaginer par quel massacre elle abattrait les références les plus précieuses à mes yeux. Pauvre de moi ! je la trouve encore bien belle, la coquine. Qu'elle parle : comment justifier une telle froideur, un tel manque de générosité ? Silence. Allez, je m'y résous : elle ne m'aime simplement pas. 

samedi 20 septembre 2008

Chinoiseries

Shanghaï vertigineuse, vue depuis le sommet de la tour Jin Mao.


Aux premières heures, Zhouzhuang offre de beaux moments de sérénité. Photo prise depuis la maison de thé Sanmao.


Tongli, déjà touristique autant que sa voisine malgré ce qu'on en dit, et moins mignonnette, aussi.


Le jardin de la Politique des Humbles à Suzhou. 


Le lac de l'Ouest à Hangzhou, sur lequel et autour duquel nous nous serons promenés pendant des jours avec plaisir. Une météo peu clémente nous a conduits à éliminer l'étape Putuoshan de notre programme ; c'est à Hangzhou qu'on voulait revenir.


Le fameux puits dit "du Dragon" qui donne son nom à Longjing.


Les Montagnes Jaunes, lieu mythique d'inspiration des peintres et poètes chinois classiques. Les nuages en se déchirant laissent apercevoir les pics environnants et la lumière changeante souligne les perspectives. Quelques pins s'accrochent sur les escarpements, aux endroits les plus fous. Le chemin qui s'enfonce dans le canyon de l'Ouest, avec ses escaliers accrochés au flanc des précipices, offre une balade inoubliable sur 600 mètres de dénivelé.


Hongcun, charmant village de l'Anhui, moins calme qu'il n'y paraît - surtout lorsque les jeunes peintres en herbe qui envahissent les ruelles arpentent à la nuit tombée le marché nocturne ou se retrouvent pour partager quelques brochettes près de la rivière ; pendant ce temps les mères de famille, au lac du Sud, prennent une leçon de madison sur une musique techno giclant d'une sono saturée. C'est amusant... pas très reposant.


Xidi.


Nanping.