mercredi 20 février 2008

Suggestion d'accompagnement

Le radiateur du salon émet un claquement régulier n'augurant certainement rien d'exaltant.

Il y a une tache de gras sur mon canapé en cuir tout neuf.

Subitement, mon réfrigérateur a dégivré. La propriétaire précédente a négligé de me laisser le réceptacle prévu à cet effet, censé se glisser sous la clayette supérieure. L'eau s'écoule derrière le bac à légumes, déborde par la porte, inonde le coin cuisine ouvert sur le salon, jusqu'au parquet. Le lierre apprécie ; l'orchidée, moins.

Et cette maudite tache de gras !

Dès que j'ouvre un robinet, le ballon d'eau chaude vrombit pendant des heures.

Ma chambre se situe sous la salle de bains des voisins, le lit précisément sous leur baignoire. Des taches d'humidité apparaissent au plafond parce qu'ils ont négligé l'entretien du joint. Les sagouins...

A propos d'humidité : des moisissures suspectes se développent sur les tuyaux derrière mes toilettes - pis que sur la galette n°31. Dois-je m'en inquiéter ?

Dans cet appartement, la salle de bains me paraît la pièce la plus sèche, paradoxalement. L'étendoir à linge, tiré au-dessus de la baignoire, a cédé sous le poids de trois chemises. En voulant le démonter, d'un coup de tournevis malencontreux, j'ai cassé le miroir se trouvant à proximité. Je me suis coupé en ramassant les morceaux.

J'ai d'ailleurs aussi cassé ma Li Xing Hu... Non, ça, ce n'est pas vrai.

J'arrive à l'âge où le métabolisme ne semble plus aller de soi. Reprendre une activité physique ? Aller courir au parc ? Cette idée farfelue, surgie de la face noire de ma personnalité, l'autre jour m'a subitement étreint. Je me suis fait mal au genou. J'ai peiné à remonter les cinq étages sans ascenseur. Plus jamais.

Un plaisantin a mis le feu au local à poubelles.

Ma boîte à lettres ne ferme plus, je soupçonne la voisine d'en face, 75 hivers, qui doit faire des gommettes de mes factures EDF en décoration de son frigo. Elle n'a probablement rien trouvé de mieux pour égayer ses journées. Si ce n'est pousser au maximum le volume de son téléviseur dès qu'elle m'entend rentrer.

Un dératiseur devait passer demain. L'escalier est infesté de souris. On peut imaginer plus accueillant que ce tapis tout rongé. Et la peinture s'écaille. Mais dans l'ensemble, l'intérieur de cette bâtisse est en bon état.

La corniche du sixième étage, en revanche, s'est fissurée et est tombée, faisant deux morts et six blessés qui n'avaient rien à faire devant chez moi. Régulièrement les pompiers vaquent à hauteur de mes fenêtres. C'est dommage pour l'immeuble. D'autant que suite à de récents éboulements, les bâtiments adjacents, construits sur d'anciennes carrières, se sont affaissés ; la lèpre de la façade n'en est que davantage mise en valeur.

Heureusement, de chez moi, je ne la vois pas. Or chez moi, j'y suis. La structure des réservoirs de Montsouris, fragilisée par ces éboulements, a cédé. Le raz-de-marée a aussi noyé la partie du XIVème arrondissement qui ne s'était pas déjà écroulée. Il y a de l'eau jusqu'au troisième étage. Je ne peux pas sortir. J'y pense : serait-ce pour cela que l'atmosphère est si humide, ici ? Et que les souris continuent à gravir l'escalier ?

Je ne peux pas sortir. Pour aller où ? La rive gauche, où ce qui en reste, j'ai fini par la connaître à force d'y traîner mes Kickers. La rive droite a été rasée suite à la chute d'une station spatiale américaine. Paco Rabanne l'avait prédit. Le saint homme.

Donc, je ne bouge pas de chez moi. Ce n'est pas très grave. J'ai juste un peu froid depuis qu'un attentat sur la ligne B du RER a soufflé les vitres et que... tiens ! mon radiateur a définitivement rendu l'âme.

Dans la cellule délimitée par ces murs, je ne me sens pas toujours seul. Parfois, la douceur de sa présence m'envahit. Je me retourne. Elle est là.

15 commentaires:

Raphael a dit…

C'est sympa chez toi.
Le charme de l'ancien, qu'ils disaient !

Chez moi, les radiateurs pètent tout l'hiver.
Ils pètent quand je me couche et éteins la lumière.
C'est étrange qu'ils se mettent à péter dans le noir.
Ce doit être masculin, un radiateur.
Pas le courage de péter au grand jour.
C'est pas comme les nourrissons de certains qui pètent sans se soucier que la lumière soit éteinte ou allumée...

Anonyme a dit…

Très bonne utilisation d'une théière PDT !
Ne sert à rien d'autre

é

Calyste a dit…

Brrrr.... Et moi qui voulais monter à Paris. J'ai bien fait de changer d'avis.
Pour les radiateurs, même constat, mais les miens ne pètent pas: ils couinent. Ca doit être des femelles...

Patrick a dit…

Ces histoires de radiateurs me chiffonnent. Certains meurent, d'autres apparaissent. Mais si les mâles sont à Paris et les femelles à Lyon, comment font-ils pour se reproduire ? Pour eux, ce ne doit pas être rose tous les jours.

Tu as raison, cher é. Je ne savais plus qu'en faire. Elle n'est même pas très jolie. La paternité de l'idée revient à Raphaël, au détour d'un fil de commentaires sur le blog Cha u Thé. Néanmoins, je trouve qu'un petit pot conique tout bête demeure plus élégant pour une plante. Je cherche d'autres utilisations pour la théière. Suggérez-m'en.

Anonyme a dit…

> La trophéière : tu l'accroches au mur telle la tête d'un animal vaincu au safari. Tu peux aussi la suspendre, telle la tête réduite de l'ennemi vaincu lors d'un combat dans la jungle urbaine.

> La Magrittière : exposée sur un socle de plastique, avec légende en verdana : "ceci n'est pas un truc en terre".

> La germoithière : tu y fais germer des graines. Attention à éviter le cresson et les petites graines. Des lentilles, du seigle, du mungo, de l'azuki, du pois chiche.

> La théière des pleurs à perdre : dès que tu as une raison de pleurer, tu prends soin de pleurer dedans (au moins une larme). Tu refermes le couvercle, la théière absorbera et contiendra ton chagrin, dont tu seras ainsi libéré. Attention à ne pas rire dedans.

> La Raselhanouthière : réceptacle et verseuse de Ras El Hanout. Prend du bon, quand même.

> La Secréthière : pour contenir les mots de passe web, ça s'accumule vite ces trucs.

Anonyme a dit…

(je pense que les radiateurs sont comme les escargots : hermaphrodites. A moins qu'ils ne soient comme les paramécies --les élecriques, surtout.)

Patrick a dit…

Flo, la "germoithière" avait de quoi me séduire. J'ai déjà évoqué mon goût pour les graines germées. Mais je doute qu'un si petit volume suffise à ma gourmandise. De plus, j'aurais peu confiance en ce germoir mal aéré.

J'aime beaucoup l'idée du réservoir à chagrin. Cependant, malgré tous mes efforts, je pleure peu. Je mettrais donc un temps infini à culotter la "chagrinière". Connaîtrais-tu un dépressif, ou une hystérique (une femme enceinte ?) qui accepterait de me la prendre en pension quelque temps pour me l'ouvrir correctement ?

En tout cas, je te conseille de vite breveter tes trouvailles, ou quelque drôle en tirera bénéfice à ta place...

Anonyme a dit…

Pour la germoithière en effet, mieux vaut être doté d'un estomac de petite contenance. Mais cela dit, un germoir n'a pas besoin d'être aéré (tous sont munis d'un couvercle), il faut en revanche rincer 2 fois par jour, et bien vider la germoithière, puisqu'elle n'est pas troutroutée dessous (mais ça peut s'arranger, une perceuse + une mèche du bon calibre et en voiture Simone).

La chagrinière ne se culotte pas : la somme des larmes et des douleurs est constante. Une larme vaut 10 000 larmes, et la fréquence n'a pas d'importance. En revanche, nul chagrin n'étant celui d'un autre, je te recommande de ne pas utiliser la chagrinière chagrinée par quelqu'un d'autre, ni de prêter la tienne. Cela pourrait avoir un effet néfaste : celui de libérer l'autre chagrination vers toi. Seul le possesseur est libéré et peut ouvrir le couvercle sans que son chagrin lui revienne.

Toutes mes sornettes et recettes sont sous creative commons : c'est cadal. Et sans risque pour moi, puisque nul autre que moi ne saurait en faire une utilisation lucrative. :D

J'en profite donc pour faire d'autres suggestions :
> La Capotière : élégante, poétique et originale, sur la table de nuit comme au salon, elle ajoutera la touche de surprise et d'humour indispensable à tout préliminaire amoureux.
> La Tagadière : pour mettre les fraises Tagada. Elle saura s'ouvrir à la perfection à leur arôme délicat.
> La Schtroumpfière : pile poil à la taille du Schtroumpf latex, qui s'y trouvera parfaitement heureux.

Anonyme a dit…

...et rendons hommage à jeancarmet, qui a créé La Grenouillère.

Patrick a dit…

A propos de Jeancarmet : les archives de Pu-Erh&Yixing seront-elles à jamais inaccessibles ?...

Anonyme a dit…

C'est très poétique tout ça ! Bravo pour votre imagination débordante.

Les accès aux archives sont disponibles sur demande sur mon email. D'ailleurs j'ai rebaptisé l'endroit...

Anonyme a dit…

Qu'est-ce qui motive cette décision de limiter l'accès à ton blog?

Anonyme a dit…

La même que celle qui a présidé à sa création : Notre bon plaisir ! ;-)

Anonyme a dit…

l'idée de la theiere pourrie du PDT est excellente !!!
merci pour l'idée de recyclage , c'est classieux un pot de fleur de 10 cl à 69 euros ( ou 59 je ne sais plus )

Patrick a dit…

C'est vrai que ça fait cher le pot de fleurs - mais ça fait encore plus cher l'objet inutile qui prend la poussière sur une étagère ! Et je me refuserais à la donner à qui que ce soit, je n'offre pas ce que je n'apprécie pas. Je ne vois donc pas d'autre solution raisonnable...