samedi 11 octobre 2008

"Cantus Missae : Credo" - Josef Rheinberger

Notre ensemble vocal servira bientôt de chœur-école au concours d'entrée en classe de direction d'un conservatoire parisien. Outre l'aspect ludique de s'essayer, le temps de l'épreuve, à d'autres chefs que le nôtre (nous ses jouets, ses agneaux), c'est aussi l'occasion de reprendre quelques pièces d'un programme passé pour, au moins, se désengluer des partitions et nous rendre disponibles aux exigences des candidats. 

J'ai souvent regretté de ne pas approfondir la connaissance qu'un petit semestre de travail d'une œuvre nous en donne, au-delà des trois ou quatre concerts qu'on propose, et de ne pas enfin nous constituer un répertoire. Ce sentiment ne m'a jamais semblé si aigu qu'avec la Messe à double chœur de Rheinberger, qui méritait mieux que quelques interjections mi-figue, mi-raisin. Je m'attristais de rester sur l'impression, pas seulement de pouvoir mieux la donner, surtout de pouvoir mieux la comprendre et m'en imprégner. Sa richesse se devine à la première écoute, qui en appelle d'autres. Je me réjouis d'en retravailler des extraits. Nous ne reprendrons cependant pas le Credo qui recèle bien des merveilles.

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À la première phrase des basses répondent les deux chœurs en dialogue. La précision des nuances rend cet échange plus subtil qu'une simple symétrie ; sur une écriture classique se superpose une sorte de romantisme d'intention qui donne de la mouvance à ce jeu de réponses. Le pianissimo du "consubstantialem patri" traduit le caractère évanescent de la substance en question. Heureusement, il ne s'agit pas de paraphraser, grâce par exemple à cet unisson en spirale sur "descendit de coelis", moins vulgaire qu'une ligne descendante. Et cet "incarnatus" si désincarné : quel mystère on nous promet là-dedans ! Quelle tendresse pour la Vierge ! Guettez alors comme le mi bémol des ténors, sur "homo factus est", frotte dans l'accord - douloureuse humaine condition...  L'unisson du chœur 2 sur le "crucifixus" en impose dans le dramatique, avant le "resurrexit" qui file sur un crescendo rapide. 

Les dialogues entre chœurs, entre telle voix et les autres, reprennent ensuite avec une intensité croissante et un apogée sur "resurrectionem" ; on en énonce la certitude avec tant de conviction, je ne demande qu'à y croire. Par un changement de tonalité ("et vitam venturi saeculi"), la pièce s'achève en pleine lumière. Les soprani se partagent un "amen" en ruban, qui devient on ne peut plus lyrique avec la phrase des ténors 1 sous les notes tenues par les autres pupitres. Et l'unisson péremptoire des deux derniers "amen" glisse sur un accord final d'une belle densité.



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J'aime les credo. La longueur du texte pourrait les desservir. Pour un athée de mon espèce, ces pièces valent moins pour ce qu'elles racontent que parce qu 'elles racontent. À côté des assertions dogmatiques, la belle histoire que voilà, si pleine de rebondissements ! L'occasion d'un récit souvent enlevé et imagé. 

Nous n'atteignons pas ce niveau de fondu, d'homogénéité du Kammerchor de Stuttgart. Je n'aurais pas une seconde la prétention de le penser. Je serais juste bien content qu'un jour nous puissions donner l'impression de dire autant de choses.

4 commentaires:

Calyste a dit…

C'est beau d'avoir une passion, deux avec le thé. Je te salue, Patrick.

Patrick a dit…

Sont-ce des passions ? Je ne sais pas. J'envisagerais sans trop de peine un monde sans thé, un monde sans musique... Le manque d'amour seul me semblerait intolérable, même si cela ne transparaît pas forcément dans ces pages.
A bientôt !

Philippe a dit…

Juste par curiosité, le pupitre des altos est-il tenu par des contraltos ou des contre-ténors (ou hautes-contre si tu préfères) ?

Patrick a dit…

Philippe, je n'ai pas en ce moment la pochette à disposition. Je crois me souvenir que dans ce choeur, le pupitre des alti est... mixte, bien qu'à majorité féminin. Je confirmerai l'information dès que possible !