
L'habit cher, le goût qu'on peut en avoir, ne me scandalise pas. L'impeccable tombé, la qualité d'une finition se monnaient de manière souvent éhontée mais logique. Qui comprend qu'on se fende de centaines d'euros pour telle théière ou tel thé ? Quitte à s'entourer de beaux objets, autant les porter si l'occasion s'en présente. La Zhu Ni en boutonnière : chouette idée du luxe.

Toutefois, la consultation de certaines pages me chiffonne. Le relooking s'affirme d'autant plus réussi que la transformation est complète. Au final, les lignes qu'on suggère, aussi élégantes soient-elles, se ressemblent toutes, avec une coupe cintrée accentuée, l'ajustement des pantalons ou le pointu des souliers. L'uniformisation contamine le langage, avec la fréquence des adjectifs "diabolique" ou "démoniaque" en un sens louangeur, dont chaque occurrence sur les forums m'est devenue douloureuse.
Sottement, cela m'attriste. L'art de la séduction, objectif affiché, entretient des codes visuels assez vulgaires. Surtout, affreusement lisibles. N'embarrasse pas toujours ce que je concevais comme l'ultime agrément : l'élégance d'être bien.
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S. m'a passé commande d'un article enjoué, enthousiaste, sur un sujet moins futile que les chiffons. Je n'y réussis pas. Je n'ai rien à dire sur le dernier Desplechin, bien écrit, bien monté, où la façon d'énoncer ce qui se tait habituellement désamorce toute possibilité de charge émotive, rendant l'ensemble froid, intellectuel, totalement dénué de réalisme - un conte. Je n'ai rien à dire des araignées de Louise Bourgeois, dont les grands formats me séduisent davantage que les petits qu'il me semble voir courir au sol ; encore moins du reste de sa production, inégale, ni belle ni dérangeante, plastique, artistique, "intéressante", c'est-à-dire pas géniale. J'aurais à dire de l'Orestie mise en scène par Olivier Py, les 4 heures de souffrance qu'il nous a infligées à faire hurler ses acteurs comme des porcs qu'on égorge ; je sens la force m'en faire défaut. Et S. a dit : "enthousiaste" !
Rien ne colle ! Et la futilité, sans m'inspirer, me délasse !
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P.S.: Je suis preneur de toute traduction de relooking, terme affreux pour lequel je ne trouve pas d'équivalent en français.